🧕 Françoise SEIGEOT – Vers l’inconnu
Née en 1828 à Lacollonge, petit village accroché aux pentes du Territoire de Belfort, Françoise grandit au milieu d’une maison débordante de vie. Le moulin de son père Henri tournait sans cesse, et dans la maison, les voix des frères, des sœurs, des oncles et des tantes emplissaient chaque pièce.
C’était une famille de meuniers, de travailleurs enracinés, solidaires et modestes. Une famille où l’on restait, où l’on reprenait l’outil du père ou du frère, où l’on n’imaginait pas franchir la mer.
Mais Françoise, elle, rêvait d’autre chose.
À la mort de sa mère en 1843, elle n’a que 15 ans. Elle voit son père vieillir, ses sœurs se marier, la maison se refermer sur elle. Rien ne lui est promis sinon le service des autres.
Et pourtant, à à peine dix-huit ans, elle prend une décision rare, presque impensable pour une jeune fille du village : partir.
Quitter le foyer, le clocher familier, les racines, pour l’Algérie. Un pays inconnu, lointain, incertain. Une terre rêvée par la France, mais redoutée par les siens.
Elle ne part pas seule.
À ses côtés, il y a son oncle Jacques, l’errant, celui qui ne s’est ja
mais vraiment laissé enfermer. Il parle de Mostaganem, de terres à défricher, d’un avenir à bâtir. Et bientôt, sa jeune sœur Marianne, restée encore quelque temps avec leur père, les rejoindra elle aussi.
Quel courage, quel élan ont animé ces deux jeunes femmes !
À une époque où les femmes suivaient, elles ont choisi.
À un âge où l’on obéissait, elles ont décidé.
Elles n’ont pas fui : elles ont espéré.
Et elles ont bâti, là-bas, une autre vie.
En 1853, Françoise épouse Charles Cassereau. Elle devient mère, s’installe à Ain Kial, puis à Tlemcen, puis à Mustapha. Elle connaîtra l’amour, le deuil, la terre algérienne.
Son oncle Jacques meurt loin des siens, à l’hôpital du Sig.
Mais grâce à lui, grâce à elles, une lignée a continué, sur un autre continent.
Et si les souvenirs de Lacollonge s’effacent, leur geste reste : celui de deux jeunes femmes, Françoise et Marianne, qui un jour ont osé l’impossible.
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