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Jacques COMBES (1773-1847), quand les mariages se succèdent

 


Jacques David COMBES (1773–1847) : tisserand, trois fois époux, père endeuillé

À Vabre, dans le Tarn, le fil et le tissu étaient une histoire de famille. Depuis des générations, les COMBES vivaient au rythme du métier à tisser. Le père de Jacques, son grand-père, son arrière-grand-père, ses frères aussi : tous étaient tisserands. Le bruit des métiers emplissait les maisons et les granges, donnant à ce coin de montagne le souffle régulier d’une survie modeste.

Né en 1773, Jacques prend naturellement place dans cette lignée. Sa vie, pourtant, ne fut pas tissée de douceur.

Trois mariages, neuf enfants, et tant de deuils

À 23 ans, il épouse Suzanne SIGUIE (27 ans). Le couple a quatre enfants, mais Suzanne meurt dix ans plus tard, laissant Jacques veuf à 33 ans, père de petits de 9 à 3 ans.

Un an après, il se remarie avec Anne PALAYSI, veuve elle aussi, mariée une première fois seulement quelques mois avant de perdre son époux. Ensemble, ils n’auront qu’un fils, Joseph. Anne meurt à 53 ans, Jacques a alors 57 ans.

Il aurait pu en rester là. Mais à 61 ans, il prend une troisième épouse : Marie BLOY, âgée de 28 ans seulement, de 33 ans sa cadette. Marie avait déjà connu deux veuvages et mis au monde trois enfants. Elle en aura encore quatre avec Jacques : Jacques, Rose, Paul (mort-né) et Benjamin (mort à 1 an). La fin est tragique : Jacques meurt en 1847, à 74 ans, un mois seulement après son petit Benjamin.

Marie, restée seule à 32 ans, connaîtra un quatrième mariage, avec Joseph CRISTOL. Elle aura eu en tout quatre maris et sept enfants, et traversé autant de deuils que d’unions.


🏡 Vivre à Vabre et dans ses environs vers 1800

Au tournant du XIXᵉ siècle, Vabre et les villages voisins du Tarn (Lacaze, Brassac, Lacaune) étaient marqués par la rudesse de la vie montagnarde.

🌾 Agriculture et subsistance

  • La plupart des familles vivaient de petites terres héritées ou partagées. On cultivait du seigle, du sarrasin, un peu de blé, des légumes. Les châtaigniers étaient précieux pour nourrir hommes et bêtes.

  • L’élevage de quelques brebis, chèvres ou porcs complétait les revenus, avec le fromage et la charcuterie.

🧵 Tissage et textile

  • Beaucoup d’habitants, comme les COMBES, étaient tisserands à domicile. Ils fabriquaient toiles et draps pour les négociants albigeois ou castrais.

  • Le métier à tisser occupait une pièce entière de la maison. Les journées étaient longues, parfois 12 à 14 heures, et les revenus faibles, dépendant des commandes des marchands.

💀 Santé et mortalité

  • Les épidémies (fièvres, dysenterie, variole) restaient fréquentes. La mortalité infantile était très élevée : 1 enfant sur 3 mourait avant l’âge de 5 ans.

  • Les femmes étaient particulièrement exposées : grossesses répétées, accouchements difficiles, absence de soins médicaux. D’où la succession de veuvages et remariages précoces.

🙏 Religion et société

  • Vabre était un foyer protestant important depuis le XVIᵉ siècle. Malgré les persécutions, la communauté avait survécu et continuait à marquer la vie locale par sa discipline de vie, son sens du travail et de la solidarité.

  • La Révolution puis le Concordat (1801) avaient apaisé les tensions, mais les fractures religieuses restaient visibles dans la région.


📌 Un destin tissé de nécessité

La vie de Jacques David COMBES illustre la condition de milliers de familles rurales du Tarn :

  • le métier transmis de génération en génération, symbole de continuité mais aussi de contrainte,

  • des unions multiples, dictées par la mort et la survie plutôt que par le choix amoureux,

  • des enfants nombreux mais fragiles, dans un monde où la vie pouvait basculer à tout instant.

À sa mort en 1847, à 74 ans, Jacques laisse derrière lui une descendance dispersée, mais aussi un héritage : celui d’un homme inscrit dans une longue chaîne de tisserands, dont le fil, fragile et tenace, traverse les siècles.


🔎 Sources et références

  • Archives départementales du Tarn (AD81) : registres paroissiaux et d’état civil de Vabre (XVIIᵉ–XIXᵉ siècles).

  • Inventaire du patrimoine textile du Tarn – Ministère de la Culture.

  • Jean-Daniel Candaux, Les protestants du Tarn et leurs réseaux (Revue d’histoire du protestantisme, 2017).

  • Alain Corbin, Le monde retrouvé de Louis-François Pinagot (1998) — une étude sur la vie des paysans et artisans du XIXᵉ siècle, très proche du contexte des COMBES.

  • INED, Histoire de la population française – données sur mortalité infantile et veuvages au XIXᵉ siècle.

  • Jean Sentou, Les toiles du Tarn et l’industrie textile languedocienne (1982).

 


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