⭐ 1739 — Un mariage endeuillé dans un contexte de surmortalité
Piat Voisin & Marguerite Goron à Ermenonville-la-Petite
📖 Introduction
L’année 1739 marque à Ermenonville-la-Petite (Eure-et-Loir) le début d’une union profondément marquée par la fragilité démographique de son époque.
Le mariage de Piat Voisin et Marguerite Goron intervient au cœur d’une période où la mortalité infantile est extrêmement élevée, et où les crises climatiques accentuent la vulnérabilité des familles rurales.
Cet article retrace la chronologie du couple et l’inscrit dans le contexte démographique du XVIIIᵉ siècle.
👤 Les époux : une union déjà marquée par le deuil
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Piat Voisin, tailleur d’habits, âgé de 35 ans, est orphelin de ses deux parents.
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Marguerite Goron est orpheline de père au moment du mariage.
Les premiers bans sont publiés le 4 janvier 1739.
Pourtant, avant même la cérémonie, survient un drame.
🕯️ Un enfant né avant le mariage… et mort deux jours plus tard
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6 janvier 1739 : naissance d’un fils, Piat.
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8 janvier 1739 : décès du nouveau-né.
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27 janvier 1739 : mariage du couple.
Le mariage n’est donc pas célébré dans la joie, mais à l’ombre d’un deuil immédiat.
👶 Une fratrie nombreuse mais frappée de plein fouet
Le couple aura 8 enfants entre 1739 et les années 1750.
Les registres indiquent :
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5 enfants morts avant 2 ans,
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2 enfants sans trace de mariage ou descendance,
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1 seul survivant, qui atteindra 75 ans.
Cette mortalité très élevée se retrouve également :
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dans la génération précédente,
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dans la fratrie du père,
ce qui indique une fragilité persistante, probablement liée au contexte local.
🌨️ Un facteur aggravant : le grand hiver 1739-1740
Les naissances et décès de janvier 1739 précèdent l’un des hivers les plus meurtriers de l’époque moderne, connu comme « le grand hiver de 1740 ».
Les historiens décrivent :
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un gel prolongé,
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la destruction des récoltes,
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une flambée de la mortalité dès janvier,
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des épidémies au printemps 1740.
Dans toute la France, les décès d’enfants explosent.
La fragilité du petit Piat, mort à deux jours, s’inscrit dans cette période climatique extrême.
🧭 Surmortalité : familiale ou régionale ?
Les données démographiques indiquent que :
📌 1. La région entière était exposée à une mortalité élevée
Les études sur Chartres (même département) montrent :
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stagnation ou déclin démographique,
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classes populaires très vulnérables,
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forte mortalité enfantine.
La population de Chartres passe par exemple de 15 712 habitants en 1709 à 12 688 en 1763, selon Benoît Garnot (Annales de démographie historique).
📌 2. La mortalité infantile en France était extrêmement élevée
D’après l’INED :
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« Aux alentours de 1740 en France, près d’un nouveau-né sur trois mourait avant un an. »
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« Sur 100 enfants nés vivants, seulement 21 atteignaient l’âge de 60 ans. »
📌 3. La famille Voisin-Goron reflète donc une réalité locale et nationale
Rien ne prouve une fragilité biologique propre à la lignée.
Les décès successifs sont cohérents avec la mortalité rurale observée dans :
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l’Eure-et-Loir,
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la région parisienne élargie,
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la France d’Ancien Régime.
🧩 Analyse : une famille révélatrice d’un siècle vulnérable
Le destin de cette famille illustre :
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la mortalité infantile structurelle des campagnes,
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l’impact violent des crises climatiques (1739-1740),
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la fragilité des familles rurales, où une descendance entière pouvait reposer sur un seul enfant survivant.
📚 Sources
Sources généalogiques (Archives départementales d’Eure-et-Loir)
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Registres paroissiaux d’Ermenonville-la-Petite :
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Publication des bans : 4 janvier 1739
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Naissance & décès de Piat Voisin (fils) : 6 & 8 janvier 1739
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Mariage Piat Voisin / Marguerite Goron : 27 janvier 1739
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Naissances & décès des 8 enfants (1739–1750)
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Sources historiques
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INED – La mortalité infantile en France.
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INED – Table de mortalité en France, XVIIIᵉ siècle.
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Garnot, Benoît – La fécondité des classes populaires à Chartres au XVIIIᵉ siècle, Annales de démographie historique.
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Études climatiques sur le grand hiver de 1740.

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